" En 1500, la population du globe doit être de l’ordre de 400 millions, dont 80 habitent les Amériques. Au milieu du 16ème siècle, de ces 80 millions il en reste 10. "
Tzvetan Todorov, La conquête de l’Amérique.
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Des Indiens parmi les derniers groupes isolés au monde ont été repérés et photographiés par avion près de la frontière entre le Pérou et le Brésil, dans une zone très reculée de la forêt amazonienne dans l’Etat d’Acre au Brésil.
"Nous avons effectué ces survols pour montrer leurs maisons, pour montrer qu’ils sont là, pour montrer qu’ils existent" a déclaré José Carlos dos Reis Meirelles Júnior, un expert chargé des Indiens isolés pour la FUNAI, la Fondation nationale de l’Indien au Brésil. "Cela est très important car certains doutent de leur existence".
M. Meirelles explique que la population de ce groupe augmente. Mais d’autres groupes isolés de la région, dont les maisons ont été photographiées par avion, sont gravement menacés par l’exploitation illégale de la forêt péruvienne. Ces activités poussent les Indiens isolés à passer la frontière et pourraient déclencher des conflits avec les quelque 500 Indiens isolés qui vivent déjà du côté brésilien.
"Ce qui se passe actuellement dans la région [au Pérou] est un immense crime contre le monde naturel, les Indiens, la faune ; c’est un témoignage de plus sur la manière complètement irrationnelle selon laquelle nous, les "civilisés", nous gérons le monde" dénonce M. Meirelles.
On estime que plus d’une centaine de peuples vivent de manière isolée dans le monde dont plus de la moitié au Brésil ou au Pérou. Tous sont gravement menacés par la spoliation de leurs terres et les maladies allogènes qui peuvent les décimer. Survival a lancé une campagne urgente en faveur de la protection de leur territoire ainsi qu’un film avec la participation de l’actrice Julie Christie.
Pour Stephen Corry, directeur de Survival International, "ces photos sont une nouvelle preuve de l’existence des Indiens isolés. Le monde doit le réaliser et s’assurer de la protection de leur territoire en vertu du droit international. Dans le cas contraire, ils disparaîtront bientôt".
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Perenco
Une compagnie française mise en cause par les Indiens
Au Pérou, Perenco, une compagnie française, est impliquée dans une bataille judiciaire qui l’oppose à une organisation indigène à propos d’un projet d’exploitation pétrolière dans des zones forestières habitées par des Indiens isolés d’Amazonie.
Une audience s’est tenu le 30 mai 2008.
Cette compagnie est présente dans une partie de l’Amazonie péruvienne où vivent au moins deux groupes d’Indiens isolés. Cette zone est susceptible de receler l’un des plus importants gisements pétroliers découverts au Pérou depuis 30 ans et le président péruvien Alan Garcia a exprimé son souhait de voir l’économie nationale transformée par cette découverte.
L’affaire a été menée devant les tribunaux par L’Association interethnique pour le développement de la forêt amazonienne du Pérou (AIDESEP), l’organisation des Indiens d’Amazonie péruvienne, qui appelle le juge à interdire à Perenco et d’autres compagnies d’exploiter le pétrole dans cette région.
L’Association interethnique pour le développement de la forêt amazonienne du Pérou (AIDESEP) a appelé les compagnies pétrolières internationales à ne pas explorer les terres des Indiens isolés. Ces derniers sont menacés d’extinction par le boom pétrolier qui a ouvert 70% de l’Amazonie péruvienne à l’exploration pétrolière. En 2007, l’AIDESEP a écrit à ces compagnies : « Nous voulons que vous preniez conscience de l’extrême vulnérabilité de ces Indiens isolés et des risques qu’ils encourent si les compagnies d’exploitation pétrolière s’installent sur leur territoire ».
Perenco a acquis le droit de mener des opérations au Pérou après avoir pris le contrôle, en début d’année, de la compagnie américaine Barrett Resources. Cette dernière s’était déjà attiré les foudres des Indiens après avoir rendu publique son intention de "communiquer" avec les groupes isolés à l’aide de mégaphones s’ils venaient à attaquer ses employés.
N’étant pas immunisés contre les maladies importées de l’extérieur, les Indiens isolés sont particulièrement vulnérables à toute forme de contact, même bref, et il n’est pas rare qu’après un premier contact plus de 50% de la population disparaisse. Malgré ce danger et sans tenir compte de la législation internationale qui reconnaît les peuples indigènes comme les occupants légitimes de leur territoire, Perenco continue ses activités dans ces zones sensibles.
Stephen Corry, directeur général de Survival International, a déclaré aujourd’hui : "La compagnie Perenco doit prendre conscience des conséquences catastrophiques de ses activités sur les Indiens isolés. Sa présence constitue une violation de la législation internationale concernant les peuples indigènes que le Pérou a ratifiée. Cette terre appartient aux Indiens. Elle doit se retirer immédiatement."
Il avait déjà prévenu, dans un communiqué de 2007, qu’« entrer en contact avec ces Indiens revient à les détruire, ce qui a malheureusement été prouvé à de nombreuses reprises. Il est grand temps de retenir les leçons de l’histoire et de faire en sorte que cela ne se reproduise plus. Le contact forcé avec de tels groupes est aussi intolérable que l’esclavage. Les compagnies pétrolières responsables ne devraient même pas envisager de s’installer sur leurs territoires ».
Pour plus d’informations
Magali Rubino 00 33 (0)1 42 41 44 10
magali@survivalfrance.org
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