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symboles inavouables de l’époque coloniale
Les zoos humains
Un film de Pascal BLANCHARD & Éric DEROO
 
Les zoos humains, symboles inavouables de l’époque coloniale et du passage du XIXe au XXe siècle, ont été totalement refoulés de notre histoire et de la mémoire collective. Ils ont pourtant existé, et c’est par dizaines de millions (400 millions selon les estimations les plus basses) que les Européens et les Américains sont venus découvrir, pour la première fois, le "sauvage"... dans des zoos, des foires, des expositions officielles, des exhibitions ethnographiques et coloniales ou sur la scène des cabarets.

Une histoire inavouable ? Le documentaire se présente comme un voyage, comme une enquête autour des derniers vestiges d’une histoire que l’on a préféré oublier. Comme si, en rendant le corps, les restes de la Vénus Hottentote à l’Afrique du Sud en 2002, la France avait tourné définitivement cette page honteuse. Les pressions, interdictions de tournage et autres événements tout au long de la réalisation du film montrent bien la difficulté à regarder en face cette histoire.

Combien reste-t-il de corps de ces spécimens exhibés dans nos musées aujourd’hui ? Qui sait qu’au jardin colonial de Nogent les vestiges, les bâtiments, les chemins sont là pour nous rappeler cette exhibition nationale et officielle de 1907 ? Qui se souvient qu’aux pieds de la Tour Eiffel, 50 millions de badauds sont venus, en 1900, découvrir les milliers de spécimens rares et exotiques ? Qui se rappelle, en visitant le dimanche le zoo Hagenbeck à Hambourg ou le Jardin d’Acclimatation à Paris, dans les mêmes enclos qu’aujourd’hui, qu’il y a 70 ans des sauvages s’offraient aux regards de millions de visiteurs ? Qui aurait pu imaginer qu’en choisissant le Quai Branly pour construire le musée dédié aux milliers d’objets pillés par les puissances coloniales, la France avait choisi un des lieux majeurs des exhibitions raciales du XIXe siècle ?

L’Occident a inventé le sauvage. Beaucoup plus, l’Europe et l’Amérique l’ont exhibé, l’ont montré, dans des zoos, des expositions ou des scènes de music-hall pour convaincre les populations blanches de leur évidente et définitive supériorité sur le monde. Telle est l’histoire des zoos Humains. Loft Story aujourd’hui n’est pas autre chose. Et, le succès est au rendez-vous. Sachant jouer de cette demande voyeuriste, les impresarios d’hier et les producteurs d’aujourd¹hui livrent en pâture des corps. Hier pour fabriquer de la race, aujourd¹hui des modèles.

Mais, ces zoos humains, expositions ethnologiques ou villages nègres restent des sujets complexes à aborder pour des pays qui mettent en exergue l’égalité de tous les êtres humains. Les difficultés de tournage, la recherche des documents enfouis, comme l’accès aux réserves où sont conservés les restes humains, ont été un long chemin pavé d’embûches. Quoi de plus normal lorsque l’on voit ce qu’ont produit les zoos humains ? De fait, ces lieux, où des individus exotiques mêlés à des bêtes sauvages étaient montrés en spectacle derrière des grilles ou des enclos à un public avide de distraction, constituent la preuve évidente du décalage entre discours et pratique au temps de l’édification des empires coloniaux. Le racisme populaire s¹est constitué avec les zoos humains. De façon ludique, à travers l’univers du spectacle et du divertissement des grandes expositions universelles, des foires et des cirques. Presque inconsciemment, l’Occident invente le sauvage. Un siècle plus tard, il faut constater, qu’il est toujours enfermé, derrière d¹autres barreaux, derrière d’autres stéréotypes.

Ces exhibitions de l’exotique (futur "indigène") constituent donc, pendant plus de 60 ans (de 1870 à 1930), le passage progressif en Occident d’un racisme "scientifique" vers un racisme colonial et "populaire" qui touchera des millions de "spectateurs" de Paris à Hambourg, de Londres à New York, de Moscou à Barcelone... Dans certaines expositions, comme à Saint Louis, à Bruxelles, à Barcelone, à Paris ou à Chicago ce sera par centaines que l’on comptera les spécimens morts en scène. Aujourd’hui au service de la science leurs dépouilles sont conservées dans les plus prestigieux musées. A regarder les images de l’enterrement de la Venus Hottentote en Afrique du Sud qui viennent conclurent ce film, on se demande comment nous avons pu oublier cette tragédie ?

Peut-on aujourd’hui considérer ce temps comme révolu ? Sans doute pas, puisqu’un village Massaï reconstitué a ouvert ses portes en Belgique en 2001, qu’un autre village de Pygmées a suivi en 2002 et qu’en Bretagne un village africain fut l’attraction majeure d’un Safari Parc au milieu des années 90. Quelle filiation avec les clichés actuels de l’Afrique, du tourisme ethnique ou des banlieues peuplées de "sauvageons" peut-on voir avec les milliers d’images issues de ces spectacles et largement diffusées pendant un siècle ? Notre regard, avide d’exotisme, est-il très différent devant la TV réalité et les divers Loft Story qui semblent consacrer une nouvelle ère de la représentation en Occident ? Voyeurisme, sensationnalisme, rapport à la "différence" ou à la "normalité", sont invariablement inscrits au c¦ur de notre regard.

Les zoos humains ne révèlent évidemment rien sur les "populations exotiques" ou sur les populations colonisées. En revanche, ils sont un extraordinaire instrument d’analyse des mentalités de l’Occident de la fin du XIXe siècle jusqu’aux années 30. Car ces zoos, expositions et jardins avaient pour vocation de montrer le rare, le curieux, l’anormal, toutes les expressions de l¹étrange et du différent, et non de provoquer une rencontre entre individus ou cultures. Dans cette "animalisation" des peuples "exotiques" par l’Occident, la mise en scène de transgressions des valeurs et des normes de ce qui constitue, pour l’Europe, la civilisation, est un élément moteur. Leur nature d’homme achevé est niée, ils sont donc colonisables, il faut les apprivoiser, les dresser, pour les conduire, à l’état d’homme civilisé. Le plus frappant, dans cette brutale "naturalisation" de l’Autre, est la réaction des élites européennes : fort peu de journalistes, d’hommes politiques ou de savants s’émeuvent des conditions sanitaires et de parcage - souvent catastrophiques - des "indigènes". C’est à ce niveau que l’on mesure la pénétration profonde d’un racisme populaire en Occident et que l’on comprend comment, en à peine 60 ans, la grande majorité des Européens a accepté, validé et soutenu l’entreprise coloniale. Dès lors, leur devenir paraît tout tracé, puisqu’ils n’étaient que des "sauvages" : l’Occident se devait de les amener à la lumière, de les sortir du zoo... où il les avait lui-même fait entrer !


DES EXHIBITIONS RACISTES QUI FASCINAIENT LES EUROPÉENS

Par Pascal Blanchard, Sandrine Lemaire et Nicolas Bancel

Ces zoos humains de la République coloniale

Comment cela a-t-il été possible ? Les Européens sont-ils capables de prendre la mesure de ce que révèlent les « zoos humains » de leur culture, de leurs mentalités, de leur inconscient et de leur psychisme collectif ? Double question alors que s’ouvre enfin, à Paris, au c ur du temple des arts - le Louvre -, la première grande exposition sur les arts premiers.

Les zoos humains, expositions ethnologiques ou villages nègres restent des sujets complexes à aborder pour des pays qui mettent en exergue l’égalité de tous les êtres humains. De fait, ces zoos, où des individus « exotiques » mêlés à des bêtes sauvages étaient montrés en spectacle derrière des grilles ou des enclos à un public avide de distraction, constituent la preuve la plus évidente du décalage existant entre discours et pratique au temps de l’édification des empires coloniaux.

« Cannibales australiens mâles et femelles. La seule et unique colonie de cette race sauvage, étrange, défigurée et la plus brutale jamais attirée de l’intérieur des contrées sauvages. Le plus bas ordre de l’humanité (1). »

L’idée de promouvoir un spectacle zoologique mettant en scène des populations exotiques apparaît en parallèle dans plusieurs pays européens au cours des années 1870. En Allemagne, tout d’abord, où, dès 1874, Karl Hagenbeck, revendeur d’animaux sauvages et futur promoteur des principaux zoos européens, décide d’exhiber des Samoa et des Lapons comme populations « purement naturelles » auprès des visiteurs avides de « sensations ». Le succès de ces premières exhibitions le conduit, dès 1876, à envoyer un de ses collaborateurs au Soudan égyptien dans le but de ramener des animaux ainsi que des Nubiens pour renouveler l’« attraction ». Ces derniers connurent un succès immédiat dans toute l’Europe, puisqu’ils furent présentés successivement dans diverses capitales comme Paris, Londres ou Berlin.

La suite de l’article sur le site du Monde Diplomatique


Ce film, issu de trois ans de recherches internationales et pluridisciplinaires, est aussi le fruit d¹un travail scientifique et de documentation important. Commencé avec les équipes de l’ACHAC et du GDR CNRS 2322 en janvier 1999, synthétisé lors du colloque international de Marseille en juin 2001 avec les 50 meilleurs spécialistes internationaux, diffusé lors du cycle de conférences d¹octobre à décembre 2001 à l’Institut du Monde Arabe et regroupé dans le livre Zoos humains. De la vénus Hottentote aux realités shows en 2002, il vient clôturer un cycle qui se situe clairement entre sciences et diffusion du savoir.

Avec la participation et les interventions de spécialistes internationaux anglais, allemands, américains, belges, français, dont André Langanay, Sylvie Chalaye, Gilles Boetsch, Hilke Thode-Arora, Nicolas Bancel, Robert Rydell, John MacKenzie, Gérard Lévy, Claus Hagenbeck, Boris Wastiau, Jean-Pierre Jacquemin.

INFOS :

Cobelco.org



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